La Camargue # Quel avenir face à la montée de la mer ?

Ce reportage est le début d’un travail au long court que je mène sur le littoral français (métropolitain et outre-mer) en zone d’irréversibilité climatique, appelée aussi zone à « risque existentiel ». Une zone d’« irréversibilité climatique » est un territoire vouée à disparaître définitivement de sa forme actuelle.
Que deviendra la Camargue d’ici 2050 ? Face aux dérèglements climatiques et la montée de la mer, ce delta gigantesque, réserve naturelle depuis 1927, classé Parc régional naturel en 1970 et qui abrite 8 sites classés Natura 2000 pour sa faune et sa flore est voué à être en grande partie submergé.
Ce delta du Rhône, aménagé par l’homme depuis l’antiquité est une prouesse d’aménagement des terres. Remblais, digues, assèchement des marécages ont permis le développement de l’agriculture, de la culture rizicole, de l’élevage de taureau, de l’industrie du sel avec les salines. Mais pour combien de temps encore ?
Les analyses du Groupement International d’Expert sur le Climat (GIEC) annoncent une augmentation du 50 cm à 1m du niveau de la mer d’ici 2050. Or, 70 % du territoire camarguais se situe à moins de 1m en dessous du niveau de la mer. Selon le Groupe Régional d’Experts sur le Climat de la Région (GREC) Paca « la rapidité des changements est le plus difficile à anticiper ». Le recul du territoire devra être anticipé, dans un premier temps les espaces naturels deviendront des espaces marins.
Ce reportage photographique s’étend du petit Rhône à Saint-Marie-de-la-mer au grand Rhône dans la région des salins de Giraud.
Si la ville d’accueil des gitans ne devrait pas trop souffrir du phénomène et bénéficier d’importants aménagements de digues que penser des permis de construire d’habitats en zones prochainement submersibles ?
Comment envisager la conservation du patrimoine historique des casernements de l’ancienne usine de la Compagnie des produits chimiques d'Alais et de la Camargue fondée en 1855, devenu l’entreprise Péchiney en 1950 qui accueilli nombre d’ouvriers immigrés ?
Quel avenir pour les entreprises chimiques et la zone portuaire ? Comment penser une adaptation qui tienne compte d’éventuelles pollutions environnementales à venir ?
L’entreprise des Sauniers de Camargue a, quand à elle, anticipé avant l’heure ce phénomène puisqu’elle a réorientée sa production principale de sel consommable à Aigues-Mortes dans une zone mieux protégée, laissant aux salins de Giraud l’exploitation réservée à l’industrie chimique. L’avancée de la mer est déjà visible depuis la plage de Piémenson ou d’énormes troncs d’arbre gisent au milieu du banc de sable, témoins immobiles d’une mer qui le recouvre régulièrement et les y dépose avec force.
Comment accompagner les cultivateurs et leur rizicultures, les éleveurs de taureaux et la viticulture alors que les sols se saliniseront par remontée phréatique ?
L’identité culturelle et territoriale de la Camargue est très forte et peut s’observer sur nombre de murs des maisons.
Des concertations sont en cours entre les experts, les élus et les habitants pour trouver ensemble des solutions à cette nécessaire adaptions à venir. Entre résistance et acceptation, certains ne veulent se résoudre au changement tandis que d’autres y voient de nouvelles opportunités.
Interroger et mettre en lumière ces personnes fera l’objet d’une seconde phase du reportage.